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A. Vous trouvez donc le dévouement injuste ?

D. Je trouve injuste de détruire l’émulation.

C. C’est vrai, cela. Et pourtant, citoyens, il y a la loi de la fraternité.

A. Oui, qu’est-ce que nous ferons pour la fraternité avec la concurrence ?

B. Dame, sans doute. La fraternité, pourtant, c’est la loi, nous la voulons, elle ne doit pas être impossible.

C. Si elle était impossible, il faudrait nous en aller chacun chez nous et faire comme auparavant.

A. C’est-à-dire renoncer à la République.

B. Je ne me croirai pourtant pas en République si on me force à m’associer d’une manière qui ne me convient pas, ou que je ne comprends pas.

C. Du moment où on serait forcé, je n’en serais plus ; au lieu que, si on me donne le temps de comprendre ce qui est juste, je m’y rendrai peut-être.

D. Eh bien, il faut attendre l’Assemblée nationale, et la question s’éclaircira.

A. Moi, je crois qu’en effet la discussion nous enseignera ce que nous devons vouloir. Alors, nous verrons ce que nous avons à faire.

D. Moi, je voudrais avoir le cœur net sur le point du salaire. L’égalité du salaire me blesse quant à présent. Pour celui qui est fort ouvrier, c’est une contrainte ; pour le faible ouvrier, c’est une aumône.

A. Le progrès cependant doit amener cela. L’esprit de fraternité nous y pousse. Voulez-vous supprimer l’esprit de fraternité ?