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Le sanctuaire de la représentation nationale ne sera jamais à l’abri d’un coup de main tant qu’on n’aura pas pris une mesure qui serait simple, économique, populaire et souveraine. Celte mesure que nous proposons aujourd’hui, avec l’espérance qu’elle sera prise en considération dans une cinquantaine d’années, consisterait à écrire sur la porte du palais de la nation : « L’Assemblée nationale n’est gardée que par la loyauté de la nation. Elle n’a pas une seule baïonnette entre elle et le peuple. Le peuple a le droit de protester et de pétitionner. Mais la nation déclare infâme tout citoyen qui franchirait le seuil de cette enceinte sans son autorisation. » Avec cela, mettez, si vous voulez, un bout de ficelle en travers de la porte pour avertir les myopes, et pour donner à ceux qui ne savent pas lire, le temps d’être renseignés par le citoyen concierge ; et, alors, si quelque français est assez insensé ou assez coupable pour abuser d’une confiance illimitée, envoyez-le aux petites-maisons ou au pénitencier.

Sans être trop optimiste et trop romanesque, je me persuade que si, le lendemain de cette triste journée du 15 mai, on eût mis, en guise de troupes, l’écriteau que je propose devant la porte de l’Assemblée, jamais assemblée n’aurait été plus tranquille et plus respectée. C’eût été là le vrai châtiment des désordres de la veille.

Au lieu de cela, un appareil militaire comme si les cosaques étaient aux portes de Paris. Quelle maladresse ! L’Assemblée ne veut pas qu’on dise que le peuple est le coupable, et sans doute elle a raison :