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que changer de nom à l’époque de rétablissement du christianisme. Sous ce rapport, le catholicisme chrétien des premiers temps ne pouvait pas s’affranchir du passé. Les générations n’eussent pas compris une idée dont la forme sensible n’eût pas été mise sous leurs yeux. Aujourd’hui, quel est l’enfant qui confond l’arbre de la liberté avec l’idée d’être libre ?

Un culte quelconque, dans le sens qu’on a donné jusqu’ici aux formes extérieures, est donc non seulement inutile aux Français de la République, mais il leur serait encore impossible. L’abolition du serment politique est un fait très significatif qui entraîne l’abolition du culte, c’est-à-dire du serment religieux, pour tout homme libre comprenant son époque.

Le culte est, dans le passé, un commandement, une obligation imposée sous peine de perdre le titre de croyant. C’est un engagement pris parle fidèle ; et, s’il y manque, il ne peut rentrer dans le giron de l’Église que repentant, confessé et absous après expiation. Quel nouveau culte s’imposera de la sorte à des hommes libres ? Comment pourrait-on rédiger la formule de ce serment : Je m’engage à être libre. On voit bien, par l’impossibilité même d’exprimer une pareille idée, que la liberté s’oppose à toute aliénation de la conscience et de la volonté humaines.

Donc, il faut que le culte se transforme avec l’idée même qu’on s’est faite jusqu’à ce jour. Il ne faut plus jouer sur les mots, ni prétendre que là où il n’y a pas de mystère impénétrable, il n’y a pas de dogme ; que là où il n’y a pas de pratique obligatoire et invariable,