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maient cavalièrement le droit et le devoir de l’homme par l’instinct de la conservation de son être, mettaient cependant la bride et le veto à chaque instinct conservateur de l’être, en aidant avec habileté à consacrer l’esclavage et la misère de ce peuple qu’on prétendait affranchir. Un député avait proposé de petits moyens pour détruire la misère. Ces moyens étaient insuffisants ; mais du moins il avait senti et démontré qu’affranchir le peuple de son antique tutelle par des formules n’était que le préliminaire des mesures qu’on devait prendre pour l’affranchir par des faits. On avait passé à l’ordre du jour. On ne pouvait pas, on voulait encore moins, à une pareille époque, fouiller à la racine du mal.

Il résulta de cette fausse doctrine de l’individualisme, que la déclaration porta uniquement sur les droits de ceux qui possèdent et sur les devoirs de ceux qui ne possèdent pas. Le sauve qui peut général fut proclamé, nous en recueillons les fruits.

Si les esprits eussent été imbus de cette vérité que l’homme est né solidaire de l’humanité tout entière, ils eussent été préparés à concevoir et à formuler le plan d’une société plus juste et plus humaine ; la solution du problème de l’égalité ne fût pas restée à l’état d’énigme et nous ne chercherions peut-être plus aujourd’hui avec angoisse et terreur le moyen d’en triompher. Mais les idées ne s’improvisent pas ; elles ont une marche bien lente, et il ne sert de rien de s’indigner de cette lenteur !

L’homme n’a pas été créé, dans les fins divines, pour