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rons d’autant meilleure grâce à les seconder que nous ne serons pas suspects de partialité ou d’engouement.

Mais je m’oublie à dire nous. Pourquoi pas ? Je m’associe à la définition de M. Ledru-Rollin :

« La pétition, c’est la presse des masses, c’est la voix de l’ensemble. Aujourd’hui que le droit d’association est détruit, que la presse est encore restreinte aux mains de ceux qui ont de l’argent, la pétition, c’est autre chose qu’un journal organe d’un parti seulement ; la pétition, c’est bien mieux que l’expression individuelle d’une opinion, d’une prétention ; la pétition, si vous le voulez, c’est tout le monde, l’œuvre comme le droit de tout le monde ; c’est une édition des pensées publiques qui n’a besoin ni d’abonnés, ni d’actionnaires, ni de preneurs, ni de beau style, dont l’éloquence est dans l’énergique vérité des faits, la modération des paroles, le nombre des signatures, et dont le public même est l’auteur. »

Ne nous intitulons plus fastueusement les amis du peuple. Nous sommes peuple nous-mêmes. Ce n’est pas seulement la souffrance physique, c’est encore plus la souffrance morale qui nous rend tous solidaires des maux publics, victimes des crimes publics. Faisons des pétitions, non à titre de bourgeois démocrates convertis à la cause populaire, mais à titre de français blessés et outragés depuis trop longtemps dans le plus sensible de leur idéal, de leur gloire et de leur amour, le culte de l’égalité.

4 novembre 1844.