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vendre. On le pouvait en certains cas, mais on n’eût osé. On avait bien assez à faire de les défendre contre les empiétements et prétentions des seigneurs, qui n’avaient pas toujours gain de cause, et à qui la loi de 96 finit parfaire entendre raison de gré ou de force. Dans ce temps-là, nous avons pu nous imaginer que la loi protégerait toujours les intérêts du pauvre. Dans le pays d’ici, nous n’en voulions pas à nos anciens maîtres ; nous ne brûlions pas leurs châteaux ; nous ne désirions ni leur mort ni leur ruine ; mais nous ne pouvions pas regretter les droits féodaux ; voilà tout le tort que nous avons eu, et si c’en est un, on nous en a bien punis depuis ! On n’a pas vengé la fierté des anciens aristocrates, mais on a contenté l’avarice des nouveaux, en leur donnant plus qu’autrefois aux autres le gouvernement de nos intérêts, à tous les degrés du pouvoir, soit payé, soit honorable. Par ainsi, nous ne dépendons pas seulement des préfets, sous-préfets et gendarmes, mais encore des maires, adjoints et conseillers municipaux, lesquels acceptent souvent lesdites places, comme ils le disent d’eux-mêmes, non pour le plaisir ou l’honneur, mais pour avoir une autorité qui leur permette de veiller à leurs intérêts et à ceux de leurs amis, de se garer des tracasseries que pourrait leur occasionner celui qui occuperait la place ; enfin, de faire respecter la grande propriété par la petite. Ils se font de ce dernier chef un mérite, un devoir et quasiment une religion. On dirait que ces pauvres riches sont dans un danger abominable de ne pas le devenir davantage, et que, si tout ce qui a un brevet