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vous priant de m’excuser si je ne sais pas bien tourner un écrit, et si je dis, faute de savoir, quelque chose que la loi défend de penser.

Vous voyez, messieurs, d’après ce commencement, que j’ai l’agrément de savoir lire et écrire, quoique je ne sois pas né dans le temps où l’on allait à l’école. Mais l’ancien curé de ma paroisse s’était amusé à m’instruire un peu, et j’ai appris le reste en essayant de lire dans les gazettes que notre ancien seigneur lui prêtait. Ce qui fait qu’au jour d’aujourd’hui, quand j’en trouve l’occasion, je fourre encore un peu le nez par-ci par-là dans les nouvelles. Eh bien, je n’en suis pas plus avancé, car tantôt je trouve dans les uns que tout va mal au pays de France, et tantôt que tout va si bien qu’on chante et qu’on banquette pour remercier le roi et le bon Dieu de la prospérité publique.

On ne peut pas se gausser du bon Dieu ; mais, tant qu’au roi, c’est bien certain qu’on se permet de l’affiner, si on lui dit que nous sommes tretous contents, et, quoi qu’en dise M. le préfet de l’Indre, qui bien sûr l’a dit pourtant à bonne intention, nous répétons tous les matins et tous les soirs, et souvent sur le midi : Ah ! si le roi le savait !

Tout en me creusant la tête pour savoir moi-même d’où nous vient tant de misère que personne ne plaint, et que personne ne dit au roi, je crois bien que je l’ai trouvé, et je ne serai pas si câlin que de ne pas oser le dire.

Oui, messieurs, j’ai trouvé le fin mot en y pensant, et, si ce n’est pas la vérité je veux perdre mon bap-