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persévérance de M. de Cavour ne rassembleraient plus les rênes de ce quadrige si malaisé à conduire : la noblesse, le peuple, l’armée, le clergé, le passé et le présent devant travailler de concert pour l’avenir.

Certes, M. de Cavour a en lui une notion très raisonnée de ces trois termes ; mais il a été plus spécialement élu par la destinée des temps modernes pour ménager les droits du premier. Garibaldi s’élançant, impétueux, vers l’avenir, représente le terme extrême. Certes, il est condamné par ses instincts et par le sentiment de sa mission orageuse à s’irriter contre des entraves parfois nécessaires aux yeux du ministre. Le roi Victor-Emmanuel est chargé de tout le poids du présent, et il a reçu avec le patriotisme et la loyauté une certaine sérénité de caractère, une santé de l’âme et du corps qui est une force nécessaire à sa périlleuse situation.

Ces trois hommes peuvent-ils se désunir sans un immense danger pour la cause commune ? L’instinct des masses, qui regardent à distance, — et ce n’est pas un mauvais point de vue pour résumer l’ensemble des choses, — pressent que le salut de la Péninsule est au prix de leur union secrète et profonde.

Et nous oserons le dire, nous dont les instincts suivent résolument Garibaldi dans ses audaces, nous qui croyons que, dans les heures de lutte suprême, les idées doivent faire place aux actions et les réflexions aux élans, nous émettrons pourtant cette opinion qui nous est imposée par un sentiment général,