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lancé sur les esprits passionnés pour le progrès, il y a beaucoup de passion, puisqu’on en vient aux gros mots sous-entendus. Mais que personne ne s’en fâche ! L’Académie, tout en se cramponnant à la mort, fait encore preuve de vie, et ce qu’elle compte encore d’âmes jeunes et de talents généreux proteste contre la majorité actuelle par des œuvres d’une vitalité féconde. La lutte règne donc là comme ailleurs, comme partout ! Quelque damasquinées et parées de rubans que soient les armes, on s’y porte des coups très-prémédités et très-âpres. Les élections académiques, aujourd’hui dirigées dans le sens conservateur, peuvent demain prendre le courant contraire : qu’en faudra-t-il conclure ?

Ce que nous avons conclu d’avance. Il n’est plus possible que l’Académie soit un jury purement littéraire. Le progrès s’y oppose. Il n’y a plus de littérature, si l’esprit s’interdit la lutte et si le goût prétend proscrire la liberté de lutter. Donc, l’Académie est ou sera un corps politique, religieux, socialiste ou philosophique. — Elle est ou sera tout ce qu’on voudra, excepté l’Académie française, instituée pour distinguer, encourager et récompenser le talent. L’impartialité est une région inaccessible, une terre promise qu’elle ne saluera point avant l’accomplissement des temps, c’est-à-dire avant l’épuisement de nos incertitudes et de nos combats, de nos impatiences et de nos résistances, enfin avant le triomphe d’une certaine unité de tendances et de convictions comme il s’en rencontre de loin en loin dans l’histoire.

La place des femmes n’est donc pas plus à l’Académie de nos jours qu’elle n’est au Sénat, au Corps législatif ou dans les armées, et l’on nous accordera