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pour emblavé) rapporterait le triple et le quadruple s’il était abondamment fumé, et que le reste de cette terre amaigrie et épuisée fût consacré à des prairies artificielles. « Mettre du trèfle et de la luzerne là où le blé peut pousser ! vous répond-il ; ah ! ce serait trop dommage ! » Il croit que Dieu lui a donné cette bonne terre pour n’y semer jamais que du froment, c’est pour lui le grain sacré ; et y laisser pousser autre chose serait une profanation dont le ciel le punirait en frappant son champ de stérilité.

Le paysan de la vallée Noire est généralement trapu et ramassé jusqu’à l’âge de vingt ans. Il grandit tard et n’est complètement développé qu’après l’âge où la conscription s’empare de lui. Il se marie jeune, et est réputé vieux pour le mariage, très-vieux à trente ans. Il est grand et maigre quand il a atteint toute sa force, et reste maigre, droit et fort jusque dans un âge très-avancé. Il n’est pas rare de voir travailler un homme de quatre-vingts ans, et à soixante ans un ouvrier est plus fort et plus soutenu à la peine qu’un jeune homme. Ils ont peu d’infirmités, et ne craignent que le passage du chaud