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avait même, dans les temps heureux de la famille de Valclos, dirigé la comédie de société au château de Valclos. Il y avait passé quelques jours, il y avait rempli un rôle et fait débuter, devant les parents et les amis, la petite Nancie, alors âgée de douze ans. Il l’avait trouvée si bien douée, qu’il avait dit devant elle en riant :

» — C’est grand dommage qu’elle soit riche. Il y a en elle l’étoffe d’une artiste.

» L’enfant n’avait jamais oublié cette parole. La pauvre demoiselle se la rappela, et courut trouver Bellamare, qui jouait à Besançon. Elle n’eut pas besoin de lui raconter sa triste histoire, il la savait. Il lui dit du théâtre tout ce qu’un honnête homme doit en dire à une honnête fille. Elle ne s’en effraya pas. Il paraît même qu’elle lui répondit :

» — Moi, je suis invulnérable. Le souvenir de nos malheurs et de nos déchirements est entré en moi comme un fer rouge ; jamais je ne serai tentée de commettre une faute.

» Bellamare céda, jura de lui servir de père, et, ne voulant point partir avec elle d’un lieu où elle était connue, il lui donna rendez-vous en Belgique, où elle débuta sous le nom d’Impéria et où personne