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courage de reprendre mes études sérieuses. La musique et le dessin me plaisaient mieux, parce qu’ils me permettaient de penser à elle. Elle avait un charmant filet de voix, était bonne musicienne et chantait délicieusement. En m’efforçant d’être bon musicien moi-même, je ne songeais qu’à chanter avec elle ou à l’accompagner. Elle m’avait fait travailler de temps en temps en voyage, et, en somme, ses leçons ont été les meilleures que j’aie reçues.

Je me donnai quelque temps le change en me persuadant que la société de Bellamare, de Léon, d’Anna et de Marco m’était aussi nécessaire que celle d’Impéria. Ils m’aimaient tant ! ils étaient si aimables et si intéressants ! Comment le milieu où je retombais ne m’eût-il pas paru insupportable ? Je me reprochais en vain ce divorce entre mes anciens amis et moi. Je me trouvais coupable de regretter la conversation de Bellamare auprès de mon père ; mais n’est-ce pas lui, mon pauvre père, qui, en me jetant dans la civilisation, m’avait condamné à rompre avec la barbarie ?

Pourtant, quand j’étais sincère avec moi-même, je sentais bien que j’eusse pu oublier Bellamare et tous mes camarades, excepté Impéria. Ce n’était pas