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n’avait encore voulu jouer qu’un ou deux de ses ouvrages, et de ce qu’il avait exigé des remaniements et des sacrifices considérables. Il disait que le devoir d’un homme d’intelligence, d’un véritable artiste comme notre directeur, était d’essayer d’instruire et de former le public, d’en créer un au besoin, n’importe où, au lieu de subir le mauvais goût et de s’asservir à l’ignorance du public tout fait de tous les pays. Bellamare avait répondu à ces reproches :

— Donne-moi une salle et cent mille francs de subvention, je te jure de faire jouer tes pièces et toutes celles des auteurs inconnus qui feront preuve de génie ou de talent, ces pièces fussent-elles destinées à n’avoir aucun succès. Je ne mettrai pas un sou dans ma poche, et je serai très-heureux de faire de l’art ; mais, avec rien, on ne peut rien.

Léon avait baissé la tête. Il n’accusait pas Bellamare, il l’estimait et l’aimait ; mais il accusait le temps et les hommes, il dédaignait son siècle, il s’y trouvait à l’étroit et s’y traînait comme un condamné qui n’a pas mérite son sort. Il ne voulait faire au vulgaire aucune concession, et son