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de sa préoccupation après la crise dont je sortais à peine, et dont les palpitations secouaient encore ma poitrine. Quand on dirait que je vous aime, serait-ce une honte pour vous ?

— Non, certes, dit-elle ; mais…

— Mais quoi ? Votre préféré le trouverait-il mauvais ?

— Si j’ai un préféré, il ne s’occupe pas de moi, je vous l’ai dit. Seulement, j’ai accepté votre amitié et ne puis m’engager davantage. Est-ce que tout va changer entre nous ? Serai-je obligée de me préserver, de m’observer, de vous traiter comme un jeune homme avec qui on compte ses paroles et même ses regards, pour ne pas agir en coquette ou en folle ? Vous savez bien que je veux rester libre, et que, pour cela, il ne faut pas se laisser aimer. Si vous êtes mon ami, vous n’engagerez pas une lutte qui m’a toujours effrayée et mise en fuite. Vous ne voulez pas me gâter un bonheur que j’ai conquis avec tant de peine après des chagrins, des malheurs dont vous n’avez pas l’idée ?

J’étais dominé par elle. Je lui jurai que je serais toujours son fraternel camarade, et qu’elle n’aurait pas à se préserver de mes obsessions. Je ne son-