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qu’elle habite plus spécialement, il trouverait une réponse nette qui serait le remède à sa douleur. Cette réponse que l’on traite de vague espérance, c’est la perpétuité du moi, qui ordonne d’entrevoir une meilleure existence pour les chers innocents que nous pleurons. Nous le connaissons, nous l’avons bu ensemble, ce calice, le plus amer qui soit versé dans la vie de famille. J’ose dire que la douleur de l’aïeule, qui sent dans ses entrailles et dans sa pensée la douleur du fils et de la fille en même temps que la sienne propre, est la plus cruelle épreuve de son existence. La blessure faite à l’instinct et à la réflexion ne se ferme pas. C’est alors qu’il faut monter au sanctuaire de la croyance qui est celui de la raison supérieure ; c’est alors qu’il faut soumettre les notions de justice personnelle aux notions de justice universelle. Si Dieu a pris cette âme qui était le plus pur de nous-mêmes, c’est qu’il la voulait heureuse, disent les chrétiens. Disons mieux, Dieu n’a pas pris cette âme : c’est notre science humaine, c’est notre puissance spécifique qui n’ont pas su la retenir ; mais Dieu l’a reçue, elle est aussi bien sauvée et vivante dans son sein, cette petite parcelle de sa divinité,