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sur miss Mowbray, et sans lui faire soupçonner l’importance qu’elle y attachait.

— Dans la situation où vous êtes vis-à-vis de lui, dit-elle, le premier point, le plus important de tous, c’est de ne pas avouer que vous aimez sans savoir si l’on vous aime.

— Oh ! certainement, ma tante, dit Sarah en rougissant.

— Il n’est pas besoin sans doute, mon enfant, que je fasse appel à votre pudeur et à votre fierté ; l’une et l’autre doivent vous suggérer une grande prudence et beaucoup d’empire sur vous-même…

— Oh ! certes, ma tante, reprit la jeune Anglaise avec un mélange d’orgueil et de douleur qui lui donna l’expression d’une vierge martyre de Titien.

— Si mon fils, poursuivit Metella, est réellement lié au célibat par quelque engagement qu’il ne puisse pas confier, même à moi, il faudra bien, Sarah, que vous vous sépariez l’un de l’autre…

— Oh ! s’écria Sarah effrayée, est-ce que vous me chasseriez de chez vous ? est-ce qu’il faudrait retourner au couvent ou en Angleterre, loin de lui, loin de vous, toute seule ?… Oh ! j’en mourrais ! Après avoir été tant aimée !

— Non, dit Metella d’une voix grave, je ne t’abandonnerai jamais ; je te suis nécessaire : nous sommes liées l’une à l’autre pour la vie.

En parlant ainsi, elle posa ses deux mains sur la tête blonde de Sarah, et leva les yeux au ciel d’un air solennel et sombre. En se consacrant à cette enfant de son adoption, elle sentait combien étaient terribles les devoirs qu’elle s’était imposés envers elle, puisqu’il faudrait peut-être lui sacrifier le bonheur de toute sa vie, la société d’Olivier.