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fatiguée du mouvement de la voiture, se rendormit à son côté.

Metella pensa à Olivier et l’associa intérieurement à la joie qu’elle éprouvait d’avoir auprès d’elle une si aimable enfant. Mais peu à peu ses idées prirent une teinte plus sombre ; des conséquences qu’elle n’avait pas encore abordées se présentèrent à son esprit ; elle regarda de nouveau Sarah, mais cette fois avec une inconcevable souffrance d’esprit et de cœur. La beauté de cette jeune fille lui fit amèrement sentir ce que la femme doit perdre de sa puissance et de son orgueil en perdant sa jeunesse. Involontairement elle mit sa main auprès de celle de Sarah : sa main était toujours belle ; mais elle pensa à son visage, et, regardant celui de sa nièce :

— Quelle différence ! pensa-t-elle ; comment Olivier fera-t-il pour ne pas s’en apercevoir ? Olivier est aussi beau qu’elle ; ils vont s’admirer mutuellement ; ils sont bons tous deux, ils s’aimeront… Et pourquoi ne s’aimeraient-ils pas ? Ils seront frère et sœur ; moi, je serai leur mère… La mère d’Olivier ! Ne le faut-il pas ? n’ai-je pas pensé cent fois qu’il en devait être ainsi ! Mais déjà ! Je ne m’attendais pas à trouver une jeune fille, une femme presque dans cette enfant ! Je n’avais pas prévu que ce serait une rivale… Une rivale, ma nièce ! mon enfant ! Quelle horreur ! Oh ! jamais !

Lady Mowbray cessa de regarder Sarah ; car, malgré elle, sa beauté, qu’elle avait admirée tout à l’heure avec joie, lui causait maintenant un effroi insurmontable ; le cœur lui battait ; elle fatiguait son cerveau à trouver une pensée de force et de calme à opposer à ces craintes qui s’élevaient de toutes parts, et que, dans sa première consternation, elle s’exagérait sans doute. De temps en temps, elle jetait sur Sarah un regard effaré,