Page:Sand - Nouvelles (1867).djvu/300

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’on sût où elle était allée ; on vit encore le jeune Olivier pendant quelques jours dans les endroits publics, se montrant comme pour prouver qu’il n’avait pas enlevé lady Mowbray. Le comte lui en sut bon gré et ne lui chercha pas querelle. Au bout de la semaine, le Genevois disparut à son tour, sans avoir prononcé devant personne le nom de lady Mowbray.

Il la rejoignit à Milan, où, selon sa promesse, elle l’attendait ; il la trouva bien pâle et bien près de la vieillesse. Je ne sais si son amour diminua, mais son amitié s’en accrut. Il se mit à ses genoux, baisa ses mains, l’appela sa mère, et la supplia de prendre courage.

— Oui, appelez-moi toujours votre mère, lui dit-elle ; je dois en avoir pour vous la tendresse et l’autorité. Écoutez donc ce que ma conscience m’ordonne de vous dire dès aujourd’hui. Vous m’avez parlé souvent de votre affection, non pas seulement de celle qu’un généreux enfant peut avoir pour un vieille amie, mais vous m’avez parlé comme un jeune homme pourrait le faire à une femme dont il désire l’amour. Je crois, mon cher Olivier, que vous vous êtes trompé alors, et qu’en me voyant vieillir chaque jour vous serez bientôt désabusé. Quant à moi, je vous dirai la vérité. J’ai essayé de partager tous vos sentiments ; je l’ai résolu, je vous l’ai presque promis. Je ne devais plus rien à Buondelmonte, et je me devais à moi-même de le laisser disposer de son avenir. J’ai quitté Florence dans l’espoir de me guérir de ce cruel amour et d’en ressentir un plus jeune et plus enivrant avec vous. Eh bien, je ne vous dirai pas aujourd’hui que ma raison repousse cette imprudente alliance entre deux âges aussi différents que le vôtre et le mien. Je ne vous dirai pas non plus que ma conscience me défend d’accepter un dévouement dont vous vous repentiriez bientôt. Je ne sais pas à quel point