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n’êtes plus dans l’âge de la gaucherie et de la timidité. Metella se sentit vivement offensée de cette insolence ; elle répondit avec aigreur ; le comte s’emporta et lui dit tout ce que depuis longtemps il n’osait pas lui dire. Metella comprit sa position, et, en s’éclairant sur son malheur, elle retrouva l’orgueil que son affection irréprochable envers le comte devait lui inspirer.

— Il suffit, monsieur, dit-elle ; il ne fallait pas me faire attendre si longtemps la vérité. Vous m’avez trop fait jouer auprès de vous un rôle odieux et ridicule. Il est temps que je comprenne celui que mon âge et le vôtre m’imposent : je vous rends votre liberté.

Il y avait longtemps que le comte aspirait à ce jour de délivrance ; il lui avait semblé que le mot échappé aux lèvres de Metella le ferait bondir de joie. Il avait trop compté sur la force que nous donne l’égoïsme. Quand il entendit ce mot si étrange entre eux, quant il vit en face ce dénoûment triste et honteux à une vie d’amour et de dévouement mutuels, il eut horreur de Metella et de lui-même ; il demeura pâle et consterné. Puis un violent sentiment de colère et de jalousie s’empara de lui.

— Sans doute, s’écria-t-il, cet aveu vous tardait, madame ! En vérité, vous êtes très-jeune de cœur, et je vous faisais injure en voulant compter vos années. Vous avez promptement rencontré le réparateur de mes torts et le consolateur de vos peines. Vous comptez recourir à lui pour oublier les maux que je vous ai causés, n’est-ce pas ? Mais il n’en sera pas ainsi ; demain, un de nous deux, madame, sera près de vous. L’autre ne vous disputera plus jamais à personne. Dieu ou le sort décidera de votre joie ou de votre désespoir.

Metella ne s’attendait point à cette bizarre fureur. La malheureuse femme se flatta d’être encore aimée ; elle