Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/219

Cette page a été validée par deux contributeurs.

vos goûts et vos intérêts, et toujours pressé de sacrifier les uns aux autres.

— Je vous remercie de la bonne opinion que vous avez de moi, répondit Albany embarrassé.

Mais il se remit pour ajouter d’un ton assez expressif :

— Ainsi, vous ne me garderiez pas votre estime si vous ne pensiez que je fais, en même temps qu’un mariage d’argent, un mariage d’inclination ?

— Je vous estimerai d’autant plus que vous ferez du mariage une chose sérieuse et de la fortune un bon usage. Maintenant, pouvez-vous me dire pourquoi, au lieu de m’écrire tout simplement votre résolution, vous avez chargé M. E… de m’en faire part ? Vous avez craint de me blesser, à ce qu’il m’a dit, parce que vous vous trouviez désormais empêché de me donner de vos nouvelles et de me demander conseil dans la gouverne de votre vie. Je suis encore assez de ce monde pour comprendre qu’une femme ne veuille pas souffrir d’autre influence sur son mari que la sienne propre, et, bien loin de m’en fâcher, je l’approuve. Il eût été cependant plus convenable et plus sincère de votre part, que votre femme, informée par vous de la sollicitude que je vous avais témoignée, m’écrivît à ce sujet quelques lignes affectueuses. J’y eusse été sensible, et j’aurais ouvertement déposé avec joie, entre ses mains, ce qu’il vous a plu d’appeler quelquefois, en riant, mon autorité souve-