Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.

hors ou causer entre eux de choses que les femmes ne peuvent pas entendre.

Dans la journée, nous étions très-occupés, Narcisse et moi. Je l’initiais pratiquement aux connaissances nécessaires à son action directe dans notre œuvre. Les travaux marchaient rapidement. Nous enrôlions des bandes d’ouvriers ; nous discutions avec tous les meuniers des bords de la Gouvre, qui s’inquiétaient de ce que nous voulions faire de leur eau, et auxquels il fallait expliquer et démontrer, souvent en vain, que, le lit de la rivière creusé et agrandi, ils en auraient davantage. Les curieux, les sceptiques, les railleurs et les envieux ne nous manquaient pas. On nous menaçait de beaucoup de procès iniques et absurdes, qui eussent pu être pour nous un grand moyen de retentissement et de succès. Mais nous voulions éviter la lutte, et Narcisse était l’homme par excellence pour soutenir ces discussions orageuses avec patience, et pour redresser ces terreurs erronées avec sa clarté ordinaire et son admirable bon sens. Parlant à chacun avec la connaissance approfondie qu’il avait de sa capacité, de ses intérêts, de son langage et de ses passions, il me devint d’un si grand secours, avec les paysans surtout, race têtue et matoise, mais facile à pénétrer, pour qui la connaît, et portée à la déférence pour les gens dont elle ne peut révoquer en doute la probité, que j’engageai notre administration à rétribuer largement,