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XXVII


Quand nous quittâmes le cimetière, il me demanda de descendre avec lui à la rivière, en me jurant qu’il n’était pas fatigué. Il voulait revoir le vieux saule avec moi. Ç’avait été, disait-il, l’idée fixe de ses jours de pire souffrance. Ç’avait été aussi la mienne et je le priai de m’attendre un instant. Je courus chercher les feuilles desséchées que j’avais toujours gardées, et je les lui fis toucher quand nous fûmes au pied de l’arbre. L’air était tiède, la nuit toute semée d’étoiles, et la rivière qui n’avait pas beaucoup d’eau bruissait si doucement qu’on l’entendait à peine ; il mit mes mains sur son cœur et me dit :

— Tu vois, Nanon, toutes choses sont aujourd’hui comme elles étaient. Ce que je t’ai promis ici, je te le promets encore. Jamais je ne te ferai de peine et jamais personne ne prendra ta place dans ce cœur-là !

Je lui racontai que j’avais toujours pensé à_ _ce moment, à cette première promesse qu’il m’avait faite et que je n’avais pas comprise, au point que plus tard j’avais cru que c’était un rêve, et que, durant ma maladie, je m’étais vue, tantôt allant au mariage avec une couronne des chatons blancs de ce vieux saule,