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XV


D’abord j’entrai peu à la prison et j’y jouai le personnage d’un timide et d’un maladroit. Je vis bientôt que Mouton m’eût souhaité plus actif et plus utile. Je m’enhardis, j’eus sa confiance, je pus entrer enfin dans la chambre où était Émilien. C’était un galetas tout nu, avec deux paillasses et deux escabeaux. Il était là avec le vieux monsieur dont j’ai parlé. Deux autres lits de paille étaient vides : c’étaient ceux des malheureux jeunes gens qu’on avait fait mourir quelques jours auparavant.

En me voyant entrer, Émilien hésita un instant ; mais, comme je me jetais à son cou, il n’y put tenir et me tint longtemps serrée sur sa poitrine en sanglotant.

— Voilà mon ange gardien, dit-il au vieux monsieur ; c’est mon amie d’enfance, c’est ma sœur devant Dieu. Elle veut me sauver, elle n’y réussira pas…

— J’y réussirai, répondis-je ; le plus difficile est fait. Je vous apporterai une corde et vous descendrez sur le toit de mon grenier. Dumont nous aidera. Ne parlez pas de nous renvoyer. Nous sommes décidés à