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Moi aussi, j’étais lâche, mais ce n’était pas pour moi que j’avais peur ; car, si je n’eusse songé à ce que j’avais à faire, je crois que j’eusse sauté à la figure de ce Baptiste et que je l’eusse souffleté.

Je sus par lui que nous ne devions pas rejoindre le convoi et qu’il marcherait toute la nuit, tandis que nous la passerions à Argenton.

— La nuit ! pensais-je, ah ! si j’étais restée sur la première voiture, j’aurais peut-être pu profiter d’un moment, d’un accident.

Alors j’avais envie de descendre, de courir, je ne savais plus ce que je voulais. Je perdais la tête. J’avais fait trop de projets, j’étais épuisée. Il ne me venait plus rien de raisonnable dans l’esprit.

Je me recommandai à Dieu. Quand nous arrivâmes à Argenton à la nuit tombée, quelles furent ma surprise et ma joie de voir le convoi à la porte de l’auberge ! on attendait des chevaux à revenir d’une autre course, et deux des cavaliers de l’escorte étaient allés pour en réquisitionner dans la ville. On disait qu’il n’y en avait plus un seul. Je regardai les deux cavaliers qui restaient. Celui qui m’avait traitée de _réquisition _n’y était pas. Les autres me remarquaient. Il y en avait un très méfiant qui me demanda si je connaissais quelque prisonnier dans le convoi. Ce n’était pas une question bien adroite. Je me méfiai à mon tour et je lui dis hardiment qu’une personne comme moi ne connaissait pas d’aristocrates.

J’entrai dans l’auberge pour n’avoir pas l’air d’examiner le convoi. Au bout d’un instant, les deux cavaliers y entrèrent aussi, conduisant un vieillard que je n’avais jamais vu, une vieille femme que j