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n’est que la femme de notre oncle… C’est une sorte d’inceste. Pourtant on aime bien la cousine, qui est la fille de notre oncle… et on épouse l’une et l’autre avec ou sans dispense du pape. Voyons donc ! nous n’avons pas encore nommé la troisième cousine. — Sur mon honneur, reprit-il en s’adressant à Amédée, je vous jure que, si mon ami a une intention particulière, je n’en suis pas le confident. J’ai parlé pour parler, comme les oiseaux chantent pour chanter, parce que le ciel est beau et que les arbres sont verts. Je dois donc m’en remettre à votre opinion, qui est la plus sensée. Le bouquet doit être collectif, et nous devons le prouver, en réunissant toutes les fleurs qui plaisent à toutes les belles hôtesses de Puy-Verdon.

— Voilà un monsieur très-bavard, pensait Amédée.

— Donc, reprit Thierray, prenons des œillets pour madame Dutertre, elle doit aimer les œillets.

— Pourquoi ?

— C’est une idée que j’ai ! des roses pompons pour mademoiselle Caroline ; un peu de tout pour mademoiselle Éveline ; et pour mademoiselle Nathalie, que réservons-nous ?

Le bout d’une baguette que tenait négligemment Amédée toucha, soit à dessein, soit au hasard, une ortie qui perçait le gazon à ses pieds.

— Oh ! oh ! se dit Thierray, celle-là, il la déteste.

Le second coup du déjeuner sonna. Amédée, qui paraissait supporter plutôt qu’écouter Thierray, tressaillit et parut impatient de retourner vers la maison. Ce pouvait être une commotion naturelle sur des nerfs délicats : il pouvait aussi avoir faim ; mais Thierray voulut s’attribuer la victoire d’avoir au moins découvert quelque chose.

— 11 y a dans cette maison, pensa-t-il, des bruits qui le font frissonner et quelqu’un qui l’attire irrésistiblement.