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Manette irritée, et M. le comte ne le donnera pas ! Écoutez, écoutez ce qu’il dit, la pauvre bête !

Je vais mourir ! je vais mourir ! répéta le perroquet avec une sorte de râle effrayant.

— Mais, enfin, m’expliquerez-vous ce cri sinistre ! dit Flavien.

— Vous ne le devinez pas, monsieur le comte ?… Eh bien, sachez que, dans les trois derniers jours de sa vie, votre grand’tante, toute paralysée et tout agonisante, ne pouvait pas dire un autre mot que celui-là. Elle ne bougeait plus de son fauteuil. On ne pouvait la lever ni la coucher, on eût craint de la tuer en la touchant, tant elle était faible. Jacot, qui était habitué à être caressé par elle, tout étonné de ce qu’elle n’approchait plus de son perchoir, essayait de lui parler pour se faire remarquer : il ne pouvait plus, il ne savait plus dire un mot ; mais, à force d’entendre sa maîtresse nous répéter d’un ton dolent : Mes bons amis, je vais mourir ! il a cru qu’elle lui commandait d’apprendre ces mots-là, et, pour se faire caresser et affriander comme il en avait l’habitude, il s’est mis à les dire comme un écho. Cela a fait peur à Madame. On a emporté l’oiseau dans une autre chambre, mais il n’a pas désappris cette plainte, et, depuis six mois, il la dit aussitôt qu’il voit du monde. Eh bien, monsieur le comte, croyez-vous que les jeunes dames de Puy-Verdon trouveront cela bien réjouissant, et qu’elles ne feront pas tordre le cou à cette pauvre bête quand elles l’entendront parler ?

— Vous avez raison, Manette, dit Flavien, que ce récit avait attristé, bien qu’il n’eût vu sa grand’tante que quelques jours en toute sa vie, dans un voyage qu’elle avait fait à Paris pour un procès, ceci rentre dans la religion de famille, et je vous donne ce perro-