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caractère. Il me semble aussi que j’aurais l’air d’une jalouse qui veut vieillir Olympe…

— Sont-ce là toutes les graves raisons que tu as mûries pendant mon absence ? dit M. Dutertre, qui savait lutter de sang-froid avec Nathalie, quand besoin était.

Jusqu’à présent, dit Nathalie d’un air tranquille et pourtant menaçant, je n’en ai pas d’autres. Mais elles ont leur poids. Vous ne voudriez pas me contraindre à une mise, à un langage qui ne me siéraient pas et me rendraient insupportable à moi-même. Vous êtes le père le plus aimable et le plus sage de la création ; vous ne nous avez jamais assujetties ni blessées en quoi que ce soit. Il doit vous être indifférent, à vous qui vous occupez des graves intérêts de la société, que, dans un intérieur que vous n’habitez pas assidûment, on attache quelque importance à des détails d’étiquette domestique, lorsqu’ils ne troublent en rien la paix de la famille.

— La paix de la famille, c’est quelque chose, sans doute ; mais ce n’est pas tout, répondit Dutertre. Il y a quelque chose de plus doux, l’union ; quelque chose de plus grand et de plus beau, l’amour. Aimez-vous les uns les autres, c’est la suprême loi sans laquelle les familles comme la société périssent.

— Oh ! mon papa, tu as raison ! s’écria Caroline. Mais, sois tranquille, va ! nous nous aimons ici ! Moi, d’abord, j’aime tout le monde, toi le premier ; et puis petite mère, qui est bonne comme toi, et puis mesdemoiselles mes sœurs, qui sont très-gentilles, quoique un peu braques… et puis toi aussi, va, quoique tu sois un taquin de premier ordre !

— Cette dernière interprétation s’adressait à Amédée Dutertre, que désignèrent les grands yeux noirs de la Benjamine, après qu’ils eurent fait le tour de la salle,