de penser que j’élève une petite fille qui ne sera pas une riche héritière, et qui ne sera pas obligée de se casser bras et jambes pour conquérir un mari pauvre.
— Oui, tout est bien ! dit Flavien ; mais tu ne m’as pas parlé de Nathalie.
Et Flavien regarda attentivement Thierray, inquiet et impatient de sa réponse.
— Pauvre Nathalie ! dit Thierray ; que Dieu lui pardonne comme nous avons tous été forcés de lui pardonner ! Oui, elle nous y a forcés, mon ami ! Soit repentir sincère, soit retour à la raison et à la vérité… et au fait, l’un ne va pas sans l’autre, elle a réparé ses fautes autant qu’il était en elle. Elle a soigné Olympe jusqu’au dernier jour avec un dévouement qui avait quelque chose de fiévreux, tant c’était assidu, humble, tenace. Je ne sais combien de nuits elle a passées à son chevet. Elle était infatigable ! elle est de fer, elle est de bronze, cette fille étrange, pour le bien comme pour le mal. À défaut de cœur, elle a la volonté, et, quand la logique de son esprit la ramène au devoir, elle ressemble à ces ascètes des anciens jours qui ne sentaient plus ni le jeûne ni l’insomnie. Après la mort d’Olympe, en voyant le désespoir de son père, elle est tombée elle-même dans un désespoir profond. Elle s’était peut-être flattée dans son orgueil, orgueil bien placé, cette fois, de le dédommager par ses soins de la perte irréparable qu’il venait de faire. Dutertre a été sublime pour elle. Jamais un mot, un regard, un soupir de reproche ! mais aussi jamais un sourire d’espérance n’est venu éclairer son front, pendant une année entière ! La pauvre Nathalie n’avait sans doute pas prévu (les cœurs tendres seuls le devinent) qu’il est des douleurs incurables, des regrets éternels. Vraiment, elle n’avait pas compris le mal qu’elle faisait ! En voyant