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partie de son cœur et de sa conscience. Et puis, tout en cachetant sa lettre, elle avait été épouvantée à l’idée que bientôt, pour complaire à Éveline, il lui faudrait mentir beaucoup pour la première fois de sa vie.




XXVIII


Dutertre, plus rassuré par la lettre d’Olympe que par celle d’Éveline, partit cependant à l’instant même pour son château. Il trouva Éveline aussi bien que possible après les émotions et les souffrances qu’elle avait endurées. Il était venu vite, sans faire aucune question à Crésus, ne voulant s’en rapporter qu’au témoignage de sa femme. Benjamine, qui avait couru au-devant de lui, avait succinctement raconté l’histoire inventée par Olympe et à laquelle l’enfant ajoutait une foi entière. Cette histoire était si simple et si vraisemblable, que Dutertre n’insista pas sur les détails. Soit par oubli, soit par un de ces profonds instincts de délicate prudence qui couvaient dans l’âme dévouée de Benjamine, elle n’avait parlé ni de Thierray, ni de M. de Saulges.

— C’est maman, avait-elle dit simplement, qui a trouvé ma pauvre petite sœur dans les rochers du parc.

Si bien que Dutertre embrassa sa fille et sa femme sans leur faire ces questions oiseuses qui ne réparent pas les accidents. Il s’occupa seulement d’interroger le médecin et le chirurgien, qui répondirent de la malade. Dutertre, à qui la crainte du tétanos se présenta, demanda si la chute avait été faite de haut, avec violence et dans des circonstances effrayantes. Éveline se hâta de répondre qu’elle n’était tombée que de sa hauteur et que son pied avait porté à faux.