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avons trouvée ici, blessée, et nous appelant à votre secours. Il fera apporter un brancard, il enverra chercher le médecin et le chirurgien ; je constaterai que-je vous ai trouvée ici, tombée de ces rochers où vous aviez voulu grimper ; je dirai que c’est moi qui vous avais donné hier l’idée de mettre ce costume pour aller surprendre et intriguer, à son réveil, Caroline, dont c’est justement l’anniversaire. Vous ajouterez que vous vous êtes déguisée ainsi de grand matin, en ayant soin de ne vous faire voir à personne ; que vous alliez cueillir vous-même votre bouquet de fête dans le parc, que vous avez voulu atteindre… tenez ! ces gentianes qui poussent là sur les rochers. — Quelle heure est-il, monsieur de Saulges ?

— Neuf heures, dit Flavien.

— Eh bien, vous avez été évanouie deux heures à cette place, dit Olympe à Éveline, vous êtes restée ensuite une heure sans pouvoir bouger et sans voir approcher personne.

— Et ce pansement que j’ai au pied, dit Éveline, il faut vite me l’ôter.

— Non, dit Olympe, c’est moi qui viens de le faire. — Monsieur de Saulges, donnez-moi la pharmacie qui est dans la voiture, mettez-la par terre à côté de moi, et allez vite au château.

Flavien obéit, admirant l’esprit des femmes.

— En fait de ruses, se dit-il, la plus austère n’est pas plus maladroite qu’une autre dans l’occasion ; si elle n’en use pas pour elle-même, elle n’en a pas moins un arsenal en réserve au profit des autres. Ah ! l’esprit de corps ! Mais à qui la faute ? Nous voulons dans le monde qu’elles aient plus de soin de leur réputation que de leur vertu. Amants, nous les voulons pures du blâme d’autrui ; époux, nous leur pardonnons l’infidélité réelle plus vo-