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aucun cas de l’argent par lui-même, parce qu’il en avait à discrétion ; mais il ne concevait point qu’on pût s’en passer quand on avait, comme Thierray, les goûts du monde, et il croyait lui rendre un service d’ami en lui aplanissant les obstacles vers la fortune. Il lui offrait et il se proposait sérieusement d’entrer en pourparlers avec Dutertre, dont il était loin de prévoir l’éloignement subit pour lui, et qu’il aimait d’autant plus qu’il lui avait immolé son amour pour Olympe. Il ne voulait pas croire à la conversation que lui rapportait Thierray.

— Non, disait-il, vous vous êtes mal expliqués et mal compris mutuellement. Tu t’y seras mal pris tout le premier. Tu l’auras blessé par quelque mépris d’artiste pour sa fortune. Il aura cru voir que tu te sacrifiais, et sa fierté s’en est émue.

— Et, dans ce cas, il eût dû me proposer un duel, répondit Thierray. Je sais qu’il est brave, et, tout père de famille qu’il est, il est presque aussi jeune que moi. Pourtant je l’attends toujours, et je t’assure que je le crois un peu fou. La pauvre Éveline a de qui tenir.

— Non, Dutertre n’est pas fou ; je le sais incapable de repousser un homme comme toi à cause de son manque de fortune. Je veux renouer l’affaire, et je le ferai malgré toi. Si cela doit finir par un duel, que diable ! finissez-en et ne soyez pas là à vous regarder comme deux sentinelles, du haut de vos donjons. J’ai donc bien fait de venir, ne fût-ce que pour te servir de témoin.

— Mon cher de Saulges, tu es le meilleur ami que j’aie jamais eu, et je ne me pardonne pas de ne t’avoir pas apprécié plus tôt. Crois à toute ma reconnaissance, mais sache que j’ai peur de ton zèle, et que je ne voudrais pas…

Ici, un cri déchirant, qui semblait partir du dehors,