Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/283

Cette page n’a pas encore été corrigée

cherai toute ma vie. Tu es venu me chanter des histoires, me dire des mensonges au sujet de… enfin, suffit !

— Mais puisque je vous dis que mademoiselle Éve…

— Tais-toi, tais-toi, vilain môme ! si tu dis encore une fois son nom, j’vas t’allonger encore une fois les oreilles.

— Allons, allons, père Forget, pas de bêtises ! Je vous jure qu’elle m’a dit ce que je vous ai dit. Je savais bien que c’était une frime pour vous faire couper dedans, et qu’elle n’allait chez vous que pour faire une farce à votre monsieur ; mais dame ! je vous ai parlé comme j’étais commandé. C’est-il ma faute ?

— C’est bon, en v’là assez, dit Forget, je ne veux pas te faire de mal aujourd’hui ; mais c’est pour te dire que, si tu as le malheur de répéter un mot de cette histoire-là, même à monsieur Thierray, qui ne sait pas seulement qui c’est qui est venu trimer la nuit dans ses corridors, tu vois bien ton arbre à piper les oiseaux ? eh bien, je prendrai un bâton de c’te taille-là, et je te réponds que, dans l’état où je te laisserai, tu ne diras plus un mot ni bon ni mauvais, car tu seras mort.

— Tiens, vieux assassin, vieux brigand ! dit Crésus d’un ton de détresse, car Forget le secouait rudement ; est-ce que vous croyez que je veux parler de ça pour me faire flanquer à la porte ? Lâchez-moi donc ! Quand je vous dis que, si vous n’en parlez pas, ça ne se saura jamais !

— À la bonne heure ! dit Forget en le lâchant et en stimulant sa fuite par l’impulsion d’un formidable coup de pied, vous êtes un joli garçon, à c’t’heure.

Crésus disparût en grommelant des injures ; Forget s’en alla avec un calme philosophique, et Thierray doubla le pas pour le rejoindre.

— Forget, lui dit-il, j’ai entendu et vu ce qui vient de