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ou emporté ce dernier gage d’amour ou de perfidie. Manette était là, donnant de l’air à l’appartement.

— Monsieur veut quelque chose ? dit-elle.

— Oui, dame Manette. Que sont devenues les fleurs qui étaient ici le jour du départ de M. de Saulges ?

— Ah ! mon Dieu, dit Manette, encore ces fleurs ! Ce sera un tour de madame Hélyette. Elle en fait ici de toutes sortes.

— Expliquez-vous, bonne dame.

— Qu’est-ce que vous voulez que j’explique ? Je n’y comprends rien. Le jour du départ de M. le comte, il me demande, et même il se fâche un peu, où j’ai pris ces fleurs qui sont sur sa cheminée. Je n’avais pas mis de fleurs, je n’en avais pas vu sur sa cheminée en entrant le soir pour faire son feu. J’ai beau le lui jurer, il me soutient qu’il y en a. Puis, impatienté, il me tourne le dos et quitte le pays. Eh bien, monsieur, je vous jure qu’il a rêvé ces fleurs-là, et qu’il les a vues en imagination ; car, après son départ, j’ai tout rangé ici, et le vase que voici était vide.

— Il les a emportées, se dit Thierray à lui-même. Allons, il persiste encore à croire qu’il est aimé, il croit cela malgré lui, comme le reste.

Thierray s’approcha du petit vase en porcelaine craquelée que lui avait désigné Manette, le prit et l’examina.

— Ne vous tourmentez pas de ces fleurs. Manette : ce n’est pas la dame au loup, c’est moi qui les avais mises dans ce vase. Elles étaient précieuses… Il est joli, ce petit vase !

Et, en le retournant, Thierray en fit tomber une petite bande de parchemin attachée par un fil à la queue brisée et séchée d’une fleur. Flavien, en prenant le bouquet et en jetant l’eau, n’avait pas aperçu la signature.