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— C’est une excellente idée, répondit vivement Dutertre, et, si tel est son désir, je regrette qu’elle ne l’ait pas dit, ce soir, quand je provoquais sa confiance ; cet arrangement terminait tout à l’amiable… Mais il sera pris demain, et j’espère que cette satisfaction l’engagera à épargner ma femme et mon repos jusqu’à notre départ.

— Ne vous dissimulez cependant pas, reprit Amédée qu’il éprouvera quelques difficultés. Éveline sera jalouse de sa sœur aînée, et voudra la suivre, car Paris commence à devenir aussi son rêve.

— Je ne puis emmener Éveline, elle est trop folle. Je ne pourrais l’accompagner au bois de Boulogne, où elle voudra faire briller sa grâce à dompter un cheval ; elle ira avec un domestique, au moment où, absorbé par les affaires ou retenu à la chambre, je m’attendrai le moins à ses escapades. Elle se perdra de réputation sans vouloir y prendre garde, ou se posera en excentrique écervelée. Tout cela est bon ici, où l’on connaît l’innocence de sa vie, et où l’affection qu’on m’accorde l’entoure de bienveillance. Ailleurs, c’est impossible ! Mais nous tournerons la difficulté : Nathalie partira comme pour un mois, afin, dirons-nous, de régler quelques affaires de succession maternelle relatives à sa prochaine majorité. Elle restera à Paris sous divers prétextes ; au besoin, on endormira l’impatience d’Éveline par des promesses. D’ailleurs, Éveline est bonne, et, l’influence de Nathalie écartée, elle redeviendra charmante.

— À la bonne heure ! dit Amédée. Mais que ferez-vous de Nathalie là-bas ? Une fille de vingt ans, très-belle et vaniteuse, sinon coquette, peut-elle et doit-elle vivre seule ? car elle sera forcément seule toute la journée, grâce à vos occupations.