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Dutertre causait avec Amédée à Puy-Verdon. Après le départ de Flavien et de Thierray, chacun s’était retiré dans son appartement, à l’exception du chef de la famille, qui avait suivi Amédée dans le pavillon carré, sous prétexte d’affaires. Quand ils furent seuls, Dutertre, fermant les registres que son neveu avait ouverts devant lui, lui parla ainsi :

— Mon enfant, tu es triste, j’en veux savoir la cause.

Amédée tressaillit douloureusement, n’essaya pas de nier, mais ne répondit pas.

— Voyons, dit Dutertre en lui prenant les deux mains, n’es-tu pas mon fils ? Ne dois-je pas connaître ton cœur, et ne dépend-il plus de moi de te rendre heureux ?

— Mon oncle, mon père ! s’écria le jeune homme en serrant les mains de M. Dutertre, je suis assez heureux si vous êtes content de moi, et je ne demande qu’à vous servir toute ma vie, de près, de loin, comme vous voudrez.

— Amédée, je veux que ce soit de près ; je veux que tu ne quittes pas ma famille, à moins que tu ne sois dégoûté d’en être.

Il attendait une effusion, un aveu. Amédée eut des larmes d’attendrissement et ne parla point.

— Voyons, voyons donc ! reprit Dutertre ; de la confiance, enfant ! Est-ce de toi-même ou de moi que tu doutes ?

— Ni de moi ni de vous, mon meilleur ami, dit Amédée. Mais j’ignore sur quoi vous m’interrogez.

— Sur ta mélancolie. Sais-tu que je te trouve changé ?

— Je me porte bien, je vous le jure ; et, si je suis mélancolique… — oui, je reconnais que je suis mélancolique, — il m’est impossible de vous en dire la cause.

— Impossible ! s’écria Dutertre étonné de la fermeté