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la mortelle souffrance d’une explication avec son indigne fille. Cette personne-là, c’est moi.

— Vous ? m’écriai-je. Vous n’y songez pas ! Vous ne pouvez pas aller chez cette femme ! vous n’irez pas… Vos amis ne le souffriront jamais ! Gédéon…

— Eh bien, quoi, M. Gédéon ? Vous croyez qu’il chasserait la gouvernante de ses enfants s’il apprenait une pareille démarche ? Il aurait peut-être raison ; mais il ne le ferait pas, car il subit l’ascendant du monde tout comme un autre ; il voit que l’hypocrisie triomphe de tout, et, grâce à la feinte dévotion de madame Irène, il n’est pas impossible qu’elle s’introduise ici un de ces jours. Madame Duport travaille pour elle ; donc, le temps presse, et il faut que je voie madame Irène.

— Ainsi vous irez chez elle ?

— Non certes ! je lui ferai dire par Jeanne que son père la prie d’aller seule à l’ermitage : c’est moi qui y serai pour la recevoir, tandis que vous emmènerez M. Sylvestre bien loin dans les bois.

— Mais que direz-vous à cette femme pour la convaincre ? C’est l’athéisme du cœur et de la conscience incarné dans une âme hypocrite et vile.

— Elle aime sa fille, je ne lui parlerai que de sa fille.

— Eh bien, moi, je crois qu’elle n’aime pas sa fille !

— Est-ce possible ?

— C’est même probable. Elle l’aime comme un jouet que l’on pare et que l’on montre ; une pareille créature n’a que de la vanité.

— Alors, je la prendrai par sa vanité. Je lui dirai que ce qu’il y aurait de plus habile et de plus triom-