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fait honneur : je tenais à vous en faire mon compliment. Je suis à la Tilleraie depuis vingt-quatre heures ; j’y passe une partie de l’été, et je viens vous demander de prendre gîte chez moi. Ma maison est la vôtre.

Tu connais peu Gédéon. Je dois te dire en trois mots tout ce que je sais de lui, car il n’est pas mon ami intime. Il a eu une jeunesse orageuse ; mais, retenu ou repris par ses parents (tu sais que la paternité israélite est rude et tenace), il est rentré dans la voie de l’ordre et de la richesse, qui, aux yeux de sa race, — de la nôtre à présent, — est le chemin de la vertu. Tout cela n’empêche pas Gédéon d’être intelligent, serviable et libéral. À présent, je continue.

Après que je l’eus cordialement remercié, l’assurant que je ne m’ennuyais pas de ma solitude, qu’elle était nécessaire à mes projets de travail, et que je trouvais ma demeure agréable, — je lui ai fait croire que j’en étais locataire et que j’avais des ressources assurées, — nous avons causé de Paris et de Vaubuisson, de nos connaissances de là-bas et de nos voisins d’ici, de sa cousine Rébecca, qui, selon lui, mènera bien son mari, de l’ermite des Grez, qu’il a souvent rencontré, mais qui n’a jamais voulu lier conversation avec lui, et finalement de mademoiselle Vallier, sur le compte de laquelle il voulait, disait-il, me consulter.

— Je sais en gros, mon cher, l’histoire de cette demoiselle, riche et ruinée, honnête et pauvre. J’ai un peu connu son père, un affreux gredin, soit dit entre nous. Je sais qu’elle se dévoue à une servante malade ; je sais qu’elle a du talent, je l’ai entendue ; je sais qu’elle a de l’instruction, de l’esprit, un noble caractère. Le médecin du pays, en qui j’ai toute confiance, m’a dit d’elle des choses superbes, peut-être en est-il