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XXV


Le jour des débats arriva. Je m’y rendis avec calme, mais l’aspect de la foule m’attrista profondément. Je n’avais là aucun appui, aucune sympathie. Il me semblait que c’eût été une raison pour trouver du moins cette apparence de respect que le malheur et l’état d’abandon réclament. Je ne vis sur tous les visages qu’une brutale et insolente curiosité. Des jeunes filles du peuple se récrièrent tout haut à mes oreilles sur ma bonne mine et ma jeunesse. Un grand nombre de femmes, appartenant à la noblesse et à la finance, étalaient aux tribunes de brillantes toilettes, comme s’il se fût agi d’une fête. Grand nombre de capucins montraient leur crâne rasé au milieu d’une populace qu’ils excitaient contre moi, et des rangs serrés de laquelle j’entendais sortir les appellations de brigand, d’impie et de bête farouche. Les hommes à la mode du pays se dandinaient aux bancs d’honneur et s’exprimaient sur ma passion en termes de ruelles. J’entendais et je voyais tout avec la tranquillité d’un profond dégoût de la vie, et comme un voyageur, arrivé au terme de sa course, voit avec indifférence et lassitude les agitations de ceux qui repartent pour un but plus lointain.

Les débats commencèrent avec cette solennité emphatique qui caractérise dans tous les temps l’exercice des fonctions de la magistrature. Mon interrogatoire fut court,