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— Qu’est-ce que le type duchesse ? Je ne suis pas comme vous, je n’ai pas beaucoup vu le monde.

— Est-ce pour ça que vous êtes aujourd’hui d’une humeur massacrante ? dit Philippe en riant.

XX

L’apparition de Marianne et de madame André mit fin à ce dialogue. Elles passaient dans le jardin, et on s’empressa de les y rejoindre. Pierre déclara à sa filleule qu’ayant été exclu si longtemps de son sanctuaire, il ne le connaissait plus et voulait voir les changements qu’elle y avait faits.

— Vous n’en trouverez aucun, répondit-elle ; mon père aimait son jardin, il l’avait planté lui-même ; je n’ai rien voulu détruire, et puis les métayers ont droit à leur part de légumes. Le temps s’est chargé de faire mourir beaucoup d’arbres, et la gelée a emporté beaucoup d’arbustes. Il en a poussé de plus rustiques, et le fond de l’enclos, au bout du verger, dont mon père avait voulu faire une pépinière, est devenu tout à fait sauvage.

— Je veux voir ça, dit Pierre, je me souviens que c’était très-mouillé, et j’avais prédit à ton père que ses arbres d’ornement n’y réussiraient pas.

— Allez-y seul, parrain, répondit Marianne ; c’est un peu humide et raboteux pour madame André.

Pierre traversa le verger et pénétra dans l’ancienne pépinière, qui occupait une langue de terrain fermé de haies très-élevées et que traversait le ruisseau. Il y fut saisi d’une sorte de ravissement. Marianne avait laissé la nature faire tous les frais de ce petit parc naturel. L’herbe y avait poussé haute et drue en certains en-