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— Certainement, ma chère petite, je n’ai rien à te refuser.

— Je vous laisse traiter en liberté ce grave sujet de préoccupation, dit Pierre André en se dirigeant vers la prairie. Les femmes ont toujours, sur ce chapitre intéressant, de petits secrets à se confier… Je serais de trop.

— Non, mon parrain, répondit Marianne. Je n’ai pas le moindre secret à confier et je m’abstiens de toute préoccupation jusqu’au moment où, votre mère et vous, vous me direz ce que je dois penser du personnage.

— Oui-dà ! tu attendras notre opinion pour te décider ?

— Certainement.

— Je n’accepte pas une pareille responsabilité, reprit André sèchement ; je ne me connais pas en maris, et je crois que tu te moques de nous en feignant de ne pas t’y connaître.

— Et comment m’y connaîtrais-je ? dit Marianne en ouvrant ses grands yeux étonnés.

— Tu sais pourquoi tu as refusé ceux qu’on t’a offerts ? Donc tu sais ce que tu veux, et pourquoi tu accepteras celui-ci.

— Ou un autre ! reprit Marianne avec un demi-sourire. Ne vous en allez pas, mon parrain, j’ai quelque chose à vous demander.

— Ah ! ce n’est pas malheureux ! Voyons, tu veux savoir comment doit être le mari qui te convient ?

Ils s’assirent tous trois sur un banc, madame André au milieu.

— Non, répondit Marianne, vous ne le savez pas, car vous n’y avez jamais songé, ou vous ne me répondriez pas sérieusement, car vous ne vous intéressez pas beaucoup à mon avenir. Je veux vous demander une chose qui n’a qu’un rapport indirect avec le mariage. Je voudrais savoir si une fille dans ma position peut s’instruire sans quitter sa demeure et ses habitudes.

— Quelle singulière question elle me fait là ! dit