Page:Sand - Malgretout.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée

comme elle a de la bonté, je vis des larmes dans ses yeux. Je l’embrassai tendrement pour lui montrer que je lui pardonnais tout ; elle me repoussa doucement et fondit en larmes.

— Dis-moi donc ce que tu as, lui dis-je en m’agenouillant près d’elle et en prenant ses mains dans les miennes. Tu es plus nerveuse que de coutume ; est-ce vraiment la musique qui te fait mal ? En ce cas, ma chérie, je ferme le piano jusqu’à ce que tu me dises de le rouvrir.

— Ou jusqu’à ce que mon père ouvre la porte aux musiciens ambulants !

— Si ces gens-là te déplaisent, on fermera la porte à double tour. Pourquoi ne pas dire tout bonnement ce qui te contrarie, au lieu de ces plaisanteries dont tu ne crois pas un mot ?

— Ah ! laisse-moi, s’écria-t-elle, ne me gronde pas ! Tu es heureuse, toi, et tu ne comprends plus le malheur des autres…

— En quoi donc consiste mon bonheur ? et depuis quand te regardes-tu comme malheureuse ?

— Tu es heureuse parce que tu peux te marier, et moi, je ne le peux plus…

— Ferais-tu un autre choix, si tu étais libre ? Je te croyais satisfaite du tien ?

— Qui te dit que je ne le suis pas ? Si c’était à recommencer, je choisirais celui que j’ai choisi ; mais ceux que l’on choisit, quels qu’ils soient, cessent d’être des amants dès qu’ils deviennent des