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acte, que, si je venais à rencontrer miss Sarah Owen, fût-elle vieille et laide, je lui offrirais à deux genoux l’hommage d’une vénération profonde et d’un dévouement fraternel à épreuve. Je vous rencontre aujourd’hui sans vous avoir cherchée. J’ignorais où vous passiez les trois quarts de l’année. Le hasard m’a jeté sur votre chemin. J’ai résolu de m’arrêter dans le voisinage, d’errer plusieurs jours, s’il le fallait, autour de votre villa et de vous assourdir de mes sérénades jusqu’à ce qu’on m’ouvrît la porte. Grâce à votre excellent père, cela s’est fait très-vite, et, grâce au tête-à-tête qui se présente et que je ne retrouverai peut-être pas, j’accomplis mon vœu. Le repousserez-vous comme un coup de tête ? Non ! vous avez trop de cœur et trop de supériorité pour ne pas voir que je suis foncièrement honnête et religieusement sincère…

Je ne sais pas ce que j’aurais dû dire et penser, si j’avais été méfiante et parfaitement maîtresse de moi ; mais sa parole rapide, sa mimique énergique et gracieuse, son sourire d’une candeur toute juvénile, enfin son beau regard sur lequel je ne puis trop insister, puisqu’à plusieurs reprises j’en ai subi l’irrésistible persuasion, me forcèrent à lui répondre que je ne doutais pas de lui, et que j’étais touchée du respect et de l’estime qu’il m’exprimait.

Je ne lui tendis pas la main, mais il vit qu’elle ne s’éloignait pas et qu’il pouvait la prendre ; il la