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Qu’y a-t-il donc d’intéressant pour vous dans mon nom très-bourgeois et très-ignoré ?

— Je vous le dirai, répondit-il avec précipitation, car ma sœur revenait vers nous ; oui, je vous le dirai, mais à vous seule !

J’étais troublée sans savoir pourquoi. Je ne pus me mêler à la conversation qui s’engagea autour du dîner interrompu et repris. Elle fut très-brillante. Abel, après avoir été autoritairement autorisé, comme il disait, à ne pas se préoccuper de son costume, parut tout de suite à l’aise et comme enchanté de nous. Je me défendis pourtant du charme de cette amabilité soudaine en me demandant si elle n’était pas banale et au service des premiers venus.

Adda ne fit pas cette réflexion. Voyant qu’il pétillait d’esprit et de gaieté, elle oublia sa fatigue et ses chagrins, elle devint tout à coup vivante et rieuse, capable, en fait de drôleries gentilles, de tenir tête à l’artiste. Mon père était charmé de sa bonne humeur. Ma petite Sarah était si bien revenue de son effroi, qu’elle grimpait sur les épaules d’Abel et lui rendait toutes ses caresses.

Mon père, tout en adoptant les usages français, avait gardé l’habitude de prolonger un peu le dessert pendant que nous lui préparions le thé au salon. Depuis la naissance récente de son fils, Adda remontait chez elle aussitôt après le dîner. Ce soir-là, elle voulut veiller un peu, et je montai seule