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pénétrer son caractère, mes longues réflexions sur le sort qu’il me destinait, tout cela était effacé comme les nuages de la nuit. Le soleil remplissait mon âme, et je n’avais plus la notion du temps. Comme les fleurs se dilataient sous le pur rayon, mon être tout entier s’abandonnait à la puissance de l’amour vrai.

Par moments, il me parlait et m’exprimait un état de son âme si semblable au mien, que je ne distinguais plus sa personnalité de la mienne ; puis nous restions sans nous parler et nous nous regardions, et, quand nos yeux erraient ailleurs, ils voyaient les mêmes choses, et notre esprit en jouissait de la même manière. Nous marchions, tantôt vite, comme affolés de jeunesse et de force, tantôt lentement, comme ivres ou attendris. Quand le paysage s’accidentait, nous entrions dans les sentiers mystérieux, nous passions partout, il me portait comme si j’eusse été ma petite Sarah. Il riait sans cause, et puis il avait les yeux pleins de larmes. Par moments, il m’entourait de ses bras en criant, et il me quittait vite, comme s’il eût eu peur de m’effrayer par un transport involontaire, ou d’être aperçu par quelqu’un qui m’eût souillée d’un soupçon.

— Oh ! que ce serait dommage, disait-il, de vous gâter cette journée, bénie entre toutes ! Vous êtes si heureuse dans la confiance, n’est-ce pas ? Vous sentez si bien que je vous aime à tout jamais et