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Il sera ce que vous le ferez. J’ai encore des forces immenses pour vous faire une fortune. J’en ai d’inépuisables pour le bonheur intime et tendre que vous avez toujours rêvé, et que je rêve avec délices depuis que je vous connais. Tenez, Sarah, ce que je vous ai dit dans votre parc au bord de la Meuse, dans cette nuit étoilée, est toujours aussi vrai. Vous êtes mon salut, mon étoile, à moi ; il ne faut pas me rejeter dans l’ombre de cette horrible caverne que nous venons de traverser, et qui est l’image de ma vie sans vous. Il y a là des beautés qui ne sont que des mirages, des merveilles qui ne sont que des vertiges ; l’enfer est sous les pieds, la voûte de la tombe s’étend partout sur la tête, et on erre là ainsi qu’une forme humaine qui a laissé son âme à la porte. J’ai horreur de la nuit, et, si je ne vous eusse cherchée dans ces ténèbres, j’y serais devenu fou. Oui, Sarah, oui, ce n’est pas une métaphore ; ma vie sans vous est comme cet abîme, tout y est mort, il n’y a pas une fleur, pas un brin d’herbe, pas un rayon. Ramenez-moi au soleil ; aimez-moi, ou je n’aimerai jamais, et je mourrai sans avoir vécu.

Je ne sais ce que je lui répondais. Mon cœur parlait sans que ma raison se rendît compte de mes paroles. Il me remerciait, il était heureux. Il pleurait d’amour et de joie. La voiture arriva, et nous reconduisit au village. Nous avions trois heures de route pour regagner Givet, et je m’avisai qu’Abel