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vous ai dit la vérité. Voilà un grand embarras de plus dans votre existence déjà si troublée. Heureusement, je suis là ; c’est moi qui guérirai Adda de cette maladie. J’ai déjà commencé, je lui ai mis en tête de plus hautes ambitions. Je veux lui faire épouser lord Hosborn, et j’y parviendrai. Il m’a trop aimée pour ne pas accepter une femme de ma main. Quant à vous, ma chère, vous épouserez Abel, je vous le promets. Ce sera d’abord un grand malheur pour vous, car c’est un fou, un fou charmant, excellent, qui, tout en vous adorant, vous causera les plus grands chagrins ; mais il vous lancera. Les artistes sont très-puissants dans le monde ; ils charment les rois et les femmes. Au bout de quelques années, ne l’aimant plus, vous connaîtrez la vie, et vous pourrez aspirer à quelque chose de mieux que l’amour. Adieu tout de bon, voici mon jeune écuyer ; au revoir !

Elle n’attendit pas ma réponse. Qu’aurais-je pu répondre à ce tourbillon de bourdonnements et de piqûres qui m’enveloppait comme un essaim de guêpes ? Elle entra dans la bergerie pour reprendre sa monture, et je m’enfonçai dans le bois pour n’avoir plus à lui parler. Je m’efforçai de me calmer. Je me trouvai ridicule de m’émouvoir des propos d’une personne qui ne pouvait pas être sérieuse malgré ses hautes prétentions. Le but qu’elle poursuivait, et dont l’audace m’avait tout d’abord étourdie, n’était-il pas puéril en lui-même ?