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triomphe, et pouvais-je puiser dans le sentiment d’une force que je n’avais pas la confiance de dire comme lui : « Aimez-moi ? »

— Écoutez, lui dis-je toute tremblante, votre volonté, votre courage, votre foi en vous-même donnent le vertige, et ce n’est pas dans cet état de trouble et d’étonnement que je veux et que je dois vous répondre. Vous avez dû triompher ainsi plus d’une fois de la défiance ou de la raison des autres. Ce ne serait pas là une victoire digne de vous. Laissez-moi redevenir calme, laissez-moi m’interroger et me connaître, moi aussi. Je veux faire, comme vous, appel à ma sincérité intérieure, à ma conscience intellectuelle. Je ne veux pas prendre pour de l’affection vraie le prestige de votre nom et de votre talent ; ce serait vous aimer comme d’autres ont dû vous aimer déjà, et cela ne vous a pas suffi, puisque vous me cherchez librement. Je veux être sûre aussi que je ne suis pas vaincue par l’ennui de la solitude, par la crainte de mon avenir. Pardonnez-moi ces hésitations ; vous ne les connaissez pas, vous qui avez de l’expérience et qui avez pu faire l’épreuve de vos forces. Moi, je suis une vieille fille qui s’est retirée de la vie avant d’avoir vécu, et à bien des égards je suis encore une enfant.

— Oui, c’est vrai ! s’écria-t-il, une enfant que j’adorerai, que je protégerai, que je porterai dans mes bras, que j’endormirai sur un lit de roses, que