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adopter cet enfant. Elle m’a répondu : « Non. Je lui ferai le sort qui conviendra à ses aptitudes, mais je n’adopterai pas d’enfant. À quoi bon ? Je craindrais de m’y attacher avec égoïsme. Celui-ci est un orphelin dont les parents ont péri dans la tempête qui la jeté dans mes bras. Je veux l’élever pour lui, non pour moi. »

Ces sages et prudentes réponses avaient si bien persuadé ma tante, qu’il n’eût pas fait bon d’émettre le moindre doute. Je gardai mes agitations pour moi seul.

Le dimanche suivant, j’étais, à trois heures après midi, dans la cambuse de mon ami Stéphen, c’est-à-dire dans la maison de maître Guillaume le pécheur. Son fils était le grand jeune homme blond, au type anglais, que je connaissais déjà. L’œil clair et intelligent, la barbe dorée, la bouche trop loin du nez et le nez trop court ; il était bien fait sans grâce, et poli sans prévenance.

— Mon ami Célio, lui dit Stéphen en me voyant entrer, ayez l’obligeance de dire à votre mère que mon hôte est là et qu’il doit avoir faim.

— Quel diable de nom donnez-vous à ce grand escogriffe ? lui demandai-je dès que le jeune homme fut sorti.

— Oui, au fait, il a un drôle de nom, répondit Stéphen, frappé pour la première fois de cette bizarrerie ; mais venez dehors. Vous n’aimez pas l’odeur du hareng séché : j’ai fait mettre le couvert sous le berceau ; ah ! dame, la verdure du tamarix n’est pas cossue, on n’en fait pas d’autre dans le pays. Je vous dirai que ce n’est pas au cabaret, c’est chez moi que nous dînons. J’ai découvert que ma vieille