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pas compromise par une brutale et lâche curiosité.

Je reprenais le chemin de la grève lorsque Stéphen m’arrêta.

— N’allez pas par là, s’écria-t-il. Diable ! la marée va monter, elle pourrait vous gagner dans des coins qui ne sont pas commodes. Prenez le sentier qui est là, au-dessus de nous.

C’était le sentier du donjon, je refusai absolument d’en faire l’escalade.

— Bah ! me dit un jeune garçon blond, de haute taille et d’une force herculéenne, ce n’est rien que de monter là ; c’est le chemin de la demoiselle.

C’était justement pour cela que je ne voulais pas le prendre. Il ne fallait pas qu’on pût lui dire que j’avais mis le pied sur son domaine.

Je répondis que je ne craignais pas le vertige, mais que je n’avais pas le droit de traverser le parc de la Canielle.

— Vous ne le traverserez pas, reprit le jeune homme, vous suivrez le mur ; le sentier coupe à travers les taillis.

Quelle bonne occasion c’était d’examiner ce mur et de connaître les sentiers de ces bois ! mais c’était trop tôt. Je m’obstinai à reprendre la grève, disant que je l’avais assez observée en venant pour être sûr de ne pas me laisser prendre, et je partis en me moquant des craintes de Stéphen. J’étais content de braver un petit danger pour commencer mon roman et pour avoir vis-à-vis de moi-même le mérite de n’avoir rien compromis par ma précipitation.

La promenade fut rude, car le chemin devenait dangereux en effet, et il y fallut de la résolution et de la présence d’esprit. Stéphen était monté sur une élé-