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— Mais il s’agit de savoir ce qu’elle entendait par ces mots-là : « Accepter sans trop souffrir ! » Comment l’entendiez-vous ?

— Je ne l’entendais pas. Elle seule pouvait être juge du degré de souffrance qu’elle aurait à vous épargner, et je me suis aveuglément soumis, comme en pareil cas un homme de cœur y est obligé envers une femme qu’il adore et qu’il respecte.

— Pourtant, moi aussi, je respectais et j’adorais cette femme, et je ne me suis pas soumis comme cela tout d’un coup…

— Vous avez eu tort.

— Plaît-il ?

— Vous avez eu tort.

— C’est possible ; mais j’avais d’autres droits que vous. Quinze ans d’amitié sont plus sérieux que deux ou trois mois d’amour, et elle m’avait si bien enhardi à croire qu’elle n’aimerait jamais personne, que sa rétractation m’a fait l’effet d’un vol et d’un meurtre. Je ne vous dissimulerai pas que j’ai fait tout au monde pour la dissuader du mariage. Je ne lui ai pas dit de mal de vous parce que je n’avais pas à en dire. Si j’avais su de vous quelque mauvaise action, je ne la lui aurais pas cachée…

— C’eût été votre devoir.

— Je vous ai maudit d’être un homme de mérite et un honnête homme ; mais j’ai remontré que vous étiez trop jeune pour elle, qu’elle se repentirait de sa folie, qu’elle aurait une vieillesse chagrine, ridicule et soupçonneuse ; enfin je lui ai dit de moi, de notre situation, de nos âges, de mon attachement inviolable, des vœux de notre entourage, tout ce que le